A Monseigneur le duc de Bourgogne
Un chat contemporain d’un fort jeune MoineauFut logé près de lui dès l’âge du berceau ;La Cage et le Panier avaient mêmes Pénates.Le Chat était souvent agacé par l’Oiseau :L’un s’escrimait du bec, l’autre jouait des pattes.Ce dernier toutefois épargnait son ami.Ne le corrigeant qu’à demiIl se fût fait un grand scrupuleD’armer de pointes sa férule.Le Passereau moins circonspect,Lui donnait force coups de bec.En sage et discrète personne,Maître Chat excusait ces jeux :Entre amis, il ne faut jamais qu’on s’abandonneAux traits d’un courroux sérieux.Comme ils se connaissaient tous deux dès leur bas âge,Une longue habitude en paix les maintenait ;Jamais en vrai combat le jeu ne se tournait ;Quand un Moineau du voisinageS’en vint les visiter, et se fit compagnonDu pétulant Pierrot et du sage Raton.Entre les deux oiseaux, il arriva querelle ;Et Raton de prendre parti.Cet inconnu, dit-il, nous la vient donner belleD’insulter ainsi notre ami !Le Moineau du voisin viendra manger le nôtre ?Non, de par tous les Chats ! Entrant lors au combat,Il croque l’étranger. Vraiment, dit maître Chat,Les Moineaux ont un goût exquis et délicat !Cette réflexion fit aussi croquer l’autre.Quelle Morale puis-je inférer de ce fait ?Sans cela toute Fable est un oeuvre imparfait.J’en crois voir quelques traits ; mais leur ombre m’abuse,Prince, vous les aurez incontinent trouvés :Ce sont des jeux pour vous, et non point pour ma Muse ;Elle et ses Soeurs n’ont pas l’esprit que vous avez.